Le Père Orlando Gaido, fondateur de la Mission de langue espagnole et portugaise du Jura et de Moutier | © DR
Dans le Jura pastoral, les communautés de langue espagnole et portugaise ont uni leurs forces au sein d’une même Mission linguistique. Une expérience de multiculturalité unique qui manifeste à sa façon l’universalité de l’Église.
«On dirait le sud», pourrait-on chantonner en arrivant à la Rue Franche 37, à Delémont. À droite du bâtiment, la Mission catholique de langue italienne. À gauche, les drapeaux des deux nations ibériques indiquent la présence de la Mission de langue espagnole et portugaise.
Sur le seuil, le Père Orlando Gaido attend cath.ch, grand sourire aux lèvres. Le prêtre de la Mission est pourtant en deuil. En ce mercredi 23 avril 2025, cela fait deux jours qu’il a perdu l’un de ses chers amis. Le prêtre argentin de 85 ans était proche du pape François, avec lequel il avait travaillé dans le diocèse de Buenos Aires. Il avait encore concélébré une messe avec Jorge Mario Bergoglio à Turin, en 2022. Il est, à l’instar de ce qu’était ce dernier, le fruit de l’immigration piémontaise en Argentine.
«L’âme» de la Mission
Orlando Gaido a de nombreux points communs avec le défunt pontife, dont l’attention aux migrants. Également artiste, le curé de la Mission jurassienne présente à cath.ch la statue de migrant, chapeau et valise à la main, qu’il a fabriquée et qui trône sous le porche du bâtiment. D’autres de ses œuvres embellissent la maison. Le prêtre argentin a également écrit quelques livres sur la migration et le statut d’étranger.
Il est, de fait, un peu «l’âme» de la Mission hispano-lusophone qui couvre le canton du Jura et la ville de Moutier, encore pour un moment dans le canton de Berne. Orlando Gaido s’est exilé en Europe lors de la dictature militaire argentine, qui a duré de 1976 à 1983. Il a d’abord officié en Allemagne avant d’être incardiné dans le diocèse de Turin, auquel il appartient toujours aujourd’hui.
Une expérience d’enrichissement mutuel
«Dans les années 1990, mon frère, qui travaillait alors en Allemagne, m’a signifié que la collectivité ecclésiastique de Bâle envisageait la création d’une mission linguistique portugaise, au vu du nombre grandissant de lusophones dans la région, explique le prêtre. Comme j’avais étudié au Brésil et que je parlais portugais, les autorités ecclésiales ont pensé que je pouvais faire l’affaire et m’ont ’emprunté’ au diocèse de Turin.»
Or, à ce moment-là, la Mission hispanophone de Delémont, qui existait depuis 1965, n’avait pas non plus de prêtre. L’idée est ainsi née de réunir les deux communautés. La Mission catholique de langue espagnole et portugaise du Jura a ainsi vu le jour le 1er octobre 1994. Elle a fêté ses 30 ans l’année passée, alors que la Mission espagnole fête ses 60 ans en 2025. Une institution bi-culturelle qui, à la connaissance d’Orlando Gaido, n’a pas son pareil en Europe.
«C’est une très belle expérience d’enrichissement mutuel», assure le prêtre. Son rôle est notamment de célébrer des messes bilingues. Chaque mois, dans l’église de Delémont, l’espagnol et le portugais résonnent en alternance. Des messes exclusivement en espagnol et en portugais sont toutefois également proposées dans le chef-lieu du Jura ainsi que dans les deux autres lieux utilisés par la Mission, à Porrentruy et à Moutier. »La chorale portugaise anime souvent les messes. Elle est de grande qualité et très appréciée», assure le prêtre.
Comme le Piémontais d’origine parle italien, il s’est souvent occupé aussi de la Mission transalpine voisine, lorsque ses prêtres étaient malades ou absents.